À Lyon, les anti-PMA entrent « en résistance »

Le docteur Raphael Nogier, Bénédicte Louis et la juriste Aude Mirkovic

L’association lyonnaise Cosette et Gavroche qui s’était illustrée en 2013 lors des manifestations contre le mariage pour tous, lance « L’acte II des États généraux de la bioéthique », une journée de débats prévue à Lyon le 15 septembre.

Selon Raphaël Nogier, médecin et président de l’association, les États généraux organisés par le gouvernement de janvier à avril 2017 ont relevé de la « parodie ». D’où la nécessité selon lui d’un deuxième acte pour que des voix discordantes soient entendues.

 

Haro sur le Comité national d’éthique

Le désir d’organiser une journée de débat est née d’un sentiment d’injustice. Bénédicte Louis, vice-présidente de Cosette et Gavroche, considère que les dés étaient pipés d’entrée de jeu.

Le 2 mai, Bénédicte Louis et Raphaël Nogier ont pourtant été entendus par le Comité national d’éthique, institution organisatrice des États généraux de la bioéthique. Mais ils déplorent que l’évènement ait été « biaisé car le Comité d’éthique a voté une motion en faveur de l’ouverture de la PMA. On ne peut pas être juge et partie. Les gens qui animaient les États généraux étaient partie prenante. » 

Pour l’heure, la procréation médicalement assistée – terme générique regroupant l’insémination artificielle comme la  fécondation in vitro – est ouverte aux seuls couples hétérosexuels. La loi Bioéthique prévue pour 2019 pourrait l’ouvrir aux couples de femmes ou aux femmes seules, comme l’avait laissé entendre Emmanuel Macron au cours de sa campagne.

 

« La médecine ne peut pas aller sur cette voie »

« Nous sommes là pour argumenter. Il n’est pas question de tomber dans l’émotion », prévient Raphaël Nogier. Selon l’association qui fut à l’origine de la lutte contre le mariage pour tous en 2012, les opinions défavorables à la PMA auraient été étouffées.

Pour appuyer son propos, Aude Mirkovic, maître de conférence en droit privé, s’appuie sur la consultation en ligne mise en place à l’occasion des États généraux. « 90 % des contributions étaient contre l’ouverture de la PMA, mais le rapport publié par le Comité national d’éthique n’en fait pas mention clairement »

La riposte s’organise donc depuis le mois de juin. D’abord, Raphaël Nogier rédige un manifeste, sorte de réponse au texte de René Frydman qui appelait en 2016 à l’ouverture de la PMA « Les gens qui ont signé le manifeste du professeur Frydman sont tous en accord avec l’ouverture de la PMA car c’est leur fond de commerce. Mon manifeste, lui, a réuni 1 800 signatures de médecins  », s’insurge Raphaël Nogier qui estime que « la médecine ne peut pas aller sur cette voie. »

 

Référent paternel

À ses yeux, il est impensable que des femmes décident d’enfanter sans homme. La perspective l’a donc poussé à s’organiser afin de sensibiliser l’opinion à cette question. « Dans la PMA classique, il y a toujours un référent paternel. Là, l’homme n’est plus rien. Une femme seule ou deux femmes peuvent avoir un enfant. Or, le père est là pour accomplir des tâches qui ne sont pas permutables avec une femme »

Et le docteur d’étayer ses vues : « La tâche de l’homme est de séparer l’enfant de sa mère, de lui montrer le monde. Le père est celui qui donne la notion de la loi, de l’interdit et du possible.  » Sans père, l’enfant ne pourrait pas apprendre à « explorer le monde  » et deviendrait allergique à la « prise de risque  ».

 

Organiser la résistance

Aude Mirkovic, membre des Juristes pour l’enfance avance déjà ses propres arguments, plus tempérés que l’exposé de Raphaël Nogier : « L’ouverture de la PMA à toutes contrevient aux droits de l’enfant. Nous fabriquons des bombes juridiques à retardement. Ces enfants finiront par attaquer l’État qui les a privé du droit de connaître leur père. »

Avec un diagnostic à ce point alarmiste, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi le docteur Nogier est si pressé d’organiser la « résistance. »

« On se bat pour l’enfant. Aujourd’hui, il est traité comme une chose. On ne l’acceptera pas. Des gens se sont rebellés dans d’autres situations de l’histoire, lorsque l’être humain était maltraité.  »

 

La Manif pour tous représentée

Si Cosette et Gavroche est seul organisateur de cette journée de débats, ses membres ne cachent pas leurs proximités idéologiques avec d’autres mouvements, tous défenseurs d’une vision traditionaliste de la famille, comme la Manif pour tous ou les Musulmans pour l’enfance.

Unanimes sur leur opposition à la PMA pour toutes, les intervenants de cet « Acte II des États généraux de la bioéthique » s’exprimeront chacun depuis leur spécialité. D’ailleurs, Ludivine de la Rochère, actuelle présidente de la Manif pour tous, fait partie de la liste des invités.

Parmi les invités lyonnais figurent également René Ecochard, professeur émérite à l’Université Lyon I et agrégé de médecine, ainsi que le militant Michel Joblot, représentant de la Manif pour tous.

 

Ne pas se laisser coller d’étiquette

Avec 300 participants attendus pour cette journée, les militants de Cosette et Gavroche ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Le discours rappelle 2013, la grande époque pour ces associations proches de la droite catholique, même si l’association ne se laisse pas coller d’étiquette, saluant « la fin du clivage droite-gauche sur ces questions ».

Il serait tentant de lier ce réveil des anti-PMA à l’ouverture prochaine de l’école de Marion Maréchal, son Institut des sciences politiques, économiques et sociales (Issep). D’ailleurs, la conférence de presse avait lieu à deux pas du jeune établissement. « Cela n’a aucun rapport, vraiment » assure Bénédicte Louis, dont l’époux, Patrick Louis, enseignant à Lyon III, co-préside le conseil scientifique de l’Issep.

En tout cas, les débats concernant la prochaine loi Bioéthique promettent d’être animés, et pas seulement dans l’hémicycle. Cosette et Gavroche promet déjà des manifestations dans l’hiver.  « Cet évènement incarne le début de quelque chose », assène Aude Mirkovic, solennelle.

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