Commissaires aux comptes : vers une scission de la majorité ?

En plus du projet de loi asile et immigration de Gérard Collomb, un autre texte plus inattendu et biens moins médiatisé pourrait attiser les dissensions naissantes au sein de la majorité LREM à l’Assemblée nationale.

Il s’agit d’un dispositif inclus dans la loi Pacte (Plan d’ action pour la croissance et la transformation des entreprises) portée par le ministre de l’Economie Bruno Le Maire : le relèvement du seuil de 2 à 8 millions d’euros de chiffre d’affaires rendant obligatoire la certification du bilan des entreprises par un Commissaire aux comptes.

 

Bonnell et Mignola hostiles au texte

En effet, face à la grogne naissante de la profession, et plus largement des métiers du chiffre regroupant également les experts-comptables, plusieurs élus de la majorité auraient manifesté leur opposition au projet selon les représentants lyonnais des deux professions : le Villeurbannais Bruno Bonnell (LREM) en tête, mais aussi le Savoyard Patrick Mignola (MoDem), tandis qu’une rencontre est prévue prochainement avec Thomas Rudigoz (LREM).

Le mouvement peut également compter sur des cadres de la Banque de France, des tribunaux de commerce, du Medef et de la CPME.

La grogne s’est déjà matérialisée par la suspension, par solidarité, de la participation des experts-comptables au dispositif bénévole Allô impôt, et se prolongera le 17 mai à l’occasion d’un mouvement de grève national.

 

80% des entreprises exemptées

À Lyon, la bonne entente entre la Compagnie régionale des commissaires aux comptes et l’Ordre des experts-comptables poussera ces derniers à venir grossir les rangs de la manifestation qui s’élancera de la manufactures des tabacs, sous les fenêtres de l’IAE dont de nombreux élèves sont concernés par le projet de réforme.

En effet, l’une des premières conséquences du texte sera l’exemption de certification des comptes pour 160 000 des 190 000 entreprises concernées jusqu’ici. Dans le périmètre de la CRCC Lyon (Rhône, Ain, Loire), ce sont 375 des 900 commissaires aux comptes qui seront donc forcés de stopper leur activité. Les experts-comptables seront également touchés puisque la plupart d’entre eux assurent des missions de commissariat aux comptes, et vice versa.

 

« Il y aura des affaires »

Voilà pour le front de l’emploi, mais les conséquences vont plus loin pour Olivier Arthaud, président de la Compagnie Régionale des Commissaires aux Comptes de Lyon , et Damien Dreux, président de l’Ordre des Experts-Comptables Rhône-Alpes.

« En France, nous sommes de culture latine. Les lois sont respectées parce qu’on s’assure qu’elles le soient », indique le premier. « Il y aura des affaires », pressent-il déjà, redoutant des tricheries. 

 

« Dogmatisme ultra-libéral »

Et Olivier Arthaud de poursuivre : « On se dirige vers plus d’optimisation fiscale du dirigeant, donc une baisse des recettes fiscales. Il y a également un risque de surconcentration des gros cabinets d’audit. Six d’entre deux, dont cinq anglo-saxons, représentent déjà 51% du chiffre d’affaires des commissaires aux comptes. Si la réforme passe, le ratio passera immédiatement à 63% et évoluera jusqu’à 70% à terme. Cela facilitera les ententes et des hausses de tarif sont à prévoir », craint-il. 

« On a l’impression d’avoir en face de nous un dogmatisme ultra-libéral », enchaîne Damien Dreux, qui prévient le gouvernement : « S’il le faut on ira plus loin, on va arrêter de jouer le jeu, de simplifier la vie de Bercy. »

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