NPG : « C’est David Kimelfeld qui est en situation d’irrégularité »

L’initiative a fait beaucoup de bruit cet été dans la sphère politico-médiatique lyonnaise. Pour héberger des réfugiés étrangers mineurs et sans-abri, Nathalie Perrin-Gilbert, maire du 1er arrondissement, a pris la responsabilité d’ouvrir, en lien avec la Coor­di­na­tion urgence migrants (Cum), un équipement de proximité dont elle a la gestion et qui reste inoccupé pendant la période estivale.

Alors que ce local, la salle Diderot, située dans les Pentes de la Croix-Rousse, s’apprête à reprendre ses activités associatives en septembre, l’heure était au bilan ce jeudi matin à la mairie du 1er lors d’une conférence de presse. Entourée d’Elliott Aubin et de Laurence Boffet, deux élus de l’arrondissement, NPG est revenue sur cette expérience qui se termine demain, tout en dénonçant « l’absurdité » de l’action de la Métropole de Lyon, la collectivité normalement en charge de ce volet.

 

« Un élan de solidarité et de générosité »

Premier point mis en avant : l’engagement des militants associatifs (Médecins du monde, Cimade, Singa, Secours populaire…), des habitants et des commerçants du quartier, venus pendant plusieurs semaines apporter leur soutien aux réfugiés, animer le lieu, surveiller les nuits et donner des denrées alimentaires.

« Très clairement, des personnes ont raccourci leur vacances ou reporté leurs congés pour apporter leur aide », raconte NPG.

« Il y a eu un élan de solidarité et de générosité. Environ 80 bénévoles ont permis l’ouverture de la salle et l’accueil des jeunes. Ce que l’on constate, c’est que, globalement, les habitants et les acteurs économiques sont prêts à faire un geste, à accueillir et ne considère pas cela comme insurmontable ou problématique. On est loin du paysage de la France raciste et rabougrie qui nous est parfois présenté ». 

Pour rappel, après avoir été alertée par des habitants de la situation de mineurs dormant dehors, la mairie du 1er a tout d’abord proposé une mise à disposition de la salle Diderot à la Métropole. Mais sans retour concret, NPG a décidé elle-même d’ouvrir ce lieu le 20 juillet.

« Étant donné que la situation se dégradait, nous avons réunis les associations et les militants politiques mener cette action ensemble. Nous ne l’aurions pas fait seuls sans ce soutien. »

 

143 jeunes accueillis 

Ouvert en fin d’après-midi, la nuit et le week-end, ce lieu de répit éphémère a permis l’accueil de 143 jeunes, presque intégralement des garçons (les jeunes filles semblent bénéficier plus facilement d’une prise en charge quand elles arrivent sur le territoire).

Ces jeunes réfugiés viennent principalement d’Afrique subsaharienne  (50 % de Guinée, 19 % du Mali, 14 % de Côte d’Ivoire, 7 % du Sénégal…). « Des chiffres qui doivent interroger la Métropole sur ses relations de coopération décentralisée à l’international. Il faut prendre attache avec ces pays pour comprendre pourquoi autant de jeunes guinéens, par exemple, partent de leur ville et quittent leur entourage familial pour venir en Europe », commente l’édile du 1er.

En termes d’âge, 9 jeunes sur 10 auraient entre 15 et 16 ans. Sur ces mineurs, 32 ont pu être hébergés dans le cadre du dispositif « classique », soit 22 %.

 

La Métropole dans le viseur

Au-delà des chiffres et de l’action humanitaire d’urgence, c’est tout un système que les élus du 1er pointent du doigts.

« Ces jeunes ne relèvent pas des politiques migratoires mais de la protection de l’enfance. Lorsqu’une personne isolée se présente comme mineure aux autorités, l’État doit immédiatement la prendre en charge, protéger sa santé et sa sécurité, et ce quelle que soit sa nationalité, explique la maire. Normalement, il y a un principe de présomption de minorité, c’est à dire que s’il y a un doute sur l’âge,  c’est à la collectivité de prouver la majorité. »

La prise en charge de ces mineurs relève aujourd’hui de la Métropole de Lyon via un service spécifique : la Méomie (Mission d’évaluation et d’orientation des mineurs isolés étrangers). Celle-ci confie l’évaluation et l’orientation à l’association Forum réfugiés-Cosi qui dispose d’un bâtiment rue Neyret, dans le 1er.

 

Gestion « mécanique »

« Or, nous avons constaté de nombreux dysfonctionnements. Si nous avons accueilli des jeunes qui se sont présentés à Forum réfugiés-Cosi en tant que mineurs, c’est que le principe de prise en charge immédiate n’est pas respecté.  » Par ailleurs, l’évaluation de la minorité qui doit être validée par le Méomie, serait douteuse, parfois basée sur la simple apparence physique, même si l’association s’en défend.

Les élus sont tombés des nues en lisant certains courriers de refus remis aux réfugiés. « Votre apparence physique ne semble pas correspondre à celle d’une personne mineure », citent-ils enchaînant avec un autre exemple de lettre comportant une erreur de frappe grossière : la date de naissance d’un jeune fixée  à… 2018. « Cela montre le caractère mécanique de la démarche, on traite cela comme on traiterait une commande de fruits et légumes, fustige Perrin-Gilbert. La collectivité oublie que c’est à elle de prouver la majorité du jeune. Elle demande aux personnes de prouver leur minorité. »

 

Une récupération politique selon Kimelfeld

Réputée procédurière, NPG n’exclut pas un recours auprès du Conseil d’État. « La Métropole ne remplit pas sa mission de protection de l’enfance qui est de mettre à l’abri tout jeune mineur avant même d’évaluer sa minorité. C’est un cas de défaillance et d’illégalité. Quelque part, ce ne sont pas les jeunes qui sont en situation irrégulière, c’est David Kimelfeld, le président de la Métropole ».

Celui qui est également maire du 4e, l’arrondissement voisin s’est quant à lui exprimé en début de semaine dans les colonnes du Progrès, dénonçant une récupération politique. « On est critiqué de toutes parts sur un sujet compliqué et très difficile humainement parlant », a-t-il confié à nos confrères précisant que le « flux »  doublait chaque année. « Entre les 1er et 31 juillet, 576 nouveaux mineurs ont été pris en charge », a-t-il ajouté, conscient de ne pas résoudre l’ensemble de la problématique.

 

De nouvelles activités pour la salle Diderot

Et pour la suite ?

La salle Diderot qui hébergeait environ 20 jeunes par nuit et en recevait une cinquante pour le petit-déjeuner et le repas va reprendre ses activités associatives la semaine prochaine. Certaines sont d’ailleurs destinées à l’accompagnement juridique des mineurs isolés. Et en cette rentrée, de nouveaux ateliers de artistiques (photo, vidéo, écriture, chant, musique…) seront également proposés à ce public le dimanche par des créateurs des 1er et 4e arrondissements.

Les élus de la place Sathonay devraient, quant à eux, poursuivre leur interventions sur un plan politique, au conseil d’arrondissement de septembre et probablement lors du conseil de la Métropole. Si le lieu de répit ferme demain, le dossier n’a pas fini de faire du bruit.

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